La formation professionnelle : un levier juridique pour sécuriser les parcours de carrière

Dans un monde du travail en constante évolution, la sécurisation des parcours professionnels est devenue un enjeu majeur pour les salariés comme pour les entreprises. La formation professionnelle s’impose comme un outil juridique incontournable pour relever ce défi. Découvrez comment le droit encadre et favorise la formation tout au long de la vie, offrant ainsi de nouvelles perspectives de développement et de mobilité aux travailleurs.

Le cadre légal de la formation professionnelle en France

La formation professionnelle en France est régie par un ensemble de textes législatifs et réglementaires qui ont considérablement évolué ces dernières années. La loi du 5 septembre 2018 pour la liberté de choisir son avenir professionnel a notamment apporté des changements significatifs dans ce domaine. Cette réforme a pour objectif de faciliter l’accès à la formation et de responsabiliser les individus dans la gestion de leur parcours professionnel.

Parmi les dispositifs phares, on peut citer le Compte Personnel de Formation (CPF), qui permet à chaque actif de cumuler des droits à la formation tout au long de sa carrière. Selon les chiffres de la Caisse des Dépôts et Consignations, plus de 38 millions de comptes CPF ont été ouverts depuis sa création, témoignant de l’engouement des Français pour ce dispositif.

La loi prévoit également des obligations pour les employeurs en matière de formation. Ainsi, les entreprises de plus de 50 salariés doivent consacrer au moins 1% de leur masse salariale au financement de la formation professionnelle. Cette obligation légale vise à garantir un investissement continu dans le développement des compétences des salariés.

Les dispositifs juridiques de sécurisation des parcours

Au-delà du CPF, plusieurs dispositifs juridiques ont été mis en place pour sécuriser les parcours professionnels par la formation. Le Plan de Développement des Compétences, qui remplace l’ancien plan de formation, permet aux employeurs de structurer leurs actions de formation en adéquation avec leur stratégie d’entreprise et les besoins des salariés.

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Le Projet de Transition Professionnelle (PTP), successeur du Congé Individuel de Formation, offre la possibilité aux salariés de s’absenter de leur poste pour suivre une formation certifiante en vue d’une reconversion. Selon les données de Transitions Pro, organisme paritaire chargé de la gestion du PTP, plus de 30 000 dossiers ont été validés en 2021, démontrant l’intérêt croissant pour ce dispositif.

La Validation des Acquis de l’Expérience (VAE) constitue également un outil juridique puissant pour sécuriser les parcours. Elle permet d’obtenir une certification professionnelle en faisant reconnaître son expérience, sans nécessairement passer par une formation formelle. D’après le ministère du Travail, environ 40 000 personnes obtiennent chaque année une certification par le biais de la VAE.

L’entretien professionnel : un outil juridique de dialogue et d’anticipation

L’entretien professionnel est une obligation légale instaurée par la loi du 5 mars 2014 relative à la formation professionnelle. Il doit être organisé tous les deux ans et vise à examiner les perspectives d’évolution professionnelle du salarié, notamment en termes de qualifications et d’emploi. Cet entretien est distinct de l’évaluation du travail du salarié et constitue un moment privilégié pour aborder les projets de formation.

La loi prévoit des sanctions pour les entreprises qui ne respecteraient pas cette obligation. Ainsi, dans les entreprises d’au moins 50 salariés, si le salarié n’a pas bénéficié des entretiens prévus et d’au moins une formation non obligatoire sur une période de six ans, l’employeur doit abonder son CPF à hauteur de 3000 euros.

Maître Sophie Durand, avocate spécialisée en droit du travail, souligne : « L’entretien professionnel est un outil juridique essentiel pour anticiper les évolutions de carrière et prévenir l’obsolescence des compétences. Il permet de formaliser un dialogue constructif entre l’employeur et le salarié sur les perspectives d’évolution et les besoins en formation. »

La formation comme outil de prévention des licenciements économiques

La formation professionnelle peut jouer un rôle crucial dans la prévention des licenciements économiques. Le Code du travail prévoit d’ailleurs que l’employeur doit tout mettre en œuvre pour adapter les salariés à l’évolution de leur emploi, notamment par le biais de la formation.

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Dans le cadre d’un Plan de Sauvegarde de l’Emploi (PSE), la loi impose à l’employeur de proposer des mesures de formation visant à faciliter le reclassement des salariés dont le licenciement est envisagé. Ces formations peuvent prendre diverses formes : remise à niveau, acquisition de nouvelles compétences, reconversion professionnelle.

Le Fonds National de l’Emploi (FNE)-Formation est un dispositif qui permet de financer des actions de formation professionnelle pour les salariés en activité partielle ou menacés de licenciement économique. En 2020, face à la crise sanitaire, ce dispositif a été renforcé et a bénéficié à plus de 420 000 salariés, selon les chiffres du ministère du Travail.

Les enjeux de la formation dans le cadre de la mobilité professionnelle

La mobilité professionnelle, qu’elle soit interne ou externe à l’entreprise, est souvent conditionnée par l’acquisition de nouvelles compétences. Le droit du travail offre plusieurs outils pour faciliter cette mobilité par le biais de la formation.

La période de professionnalisation, remplacée depuis 2019 par la Pro-A (promotion ou reconversion par alternance), permet aux salariés en CDI de bénéficier d’actions de formation en alternance pour accéder à un niveau de qualification supérieur ou changer de métier.

Le bilan de compétences, inscrit dans le Code du travail, offre la possibilité au salarié de faire le point sur ses compétences, aptitudes et motivations, et de définir un projet professionnel ou de formation. Il peut être réalisé dans le cadre du CPF ou du plan de développement des compétences de l’entreprise.

Maître Jean Dupont, avocat en droit social, explique : « La formation est un levier juridique puissant pour sécuriser les transitions professionnelles. Elle permet non seulement d’acquérir de nouvelles compétences, mais aussi de valoriser son expérience et d’obtenir des certifications reconnues sur le marché du travail. »

La formation comme outil de lutte contre les discriminations

La formation professionnelle peut également être utilisée comme un outil juridique pour lutter contre les discriminations et promouvoir l’égalité des chances dans l’entreprise. Le Code du travail prévoit que l’employeur doit assurer l’adaptation des salariés à leur poste de travail et veiller au maintien de leur capacité à occuper un emploi, au regard notamment de l’évolution des emplois, des technologies et des organisations.

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Dans ce cadre, des actions de formation spécifiques peuvent être mises en place pour favoriser l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes, l’insertion professionnelle des travailleurs handicapés ou encore l’emploi des seniors. Par exemple, l’accord national interprofessionnel du 9 mars 2006 relatif à l’emploi des seniors prévoit des mesures de formation adaptées pour cette catégorie de salariés.

La Commission nationale de la certification professionnelle (CNCP) veille à ce que les certifications professionnelles soient accessibles à tous, sans discrimination. Elle s’assure notamment que les modalités d’évaluation prennent en compte les situations de handicap.

L’impact du numérique sur la sécurisation juridique des parcours par la formation

La transformation numérique a profondément modifié les modalités d’accès à la formation professionnelle. Le législateur a pris en compte ces évolutions en reconnaissant juridiquement la valeur des formations à distance et en ligne.

La loi du 5 septembre 2018 a ainsi élargi la définition de l’action de formation pour y inclure les formations en situation de travail (AFEST) et les formations à distance. Cette reconnaissance juridique permet de sécuriser les parcours de formation réalisés en dehors des cadres traditionnels.

Le développement des MOOC (Massive Open Online Courses) et des SPOC (Small Private Online Courses) offre de nouvelles opportunités de formation, accessibles à un large public. Certains de ces cours en ligne peuvent désormais être éligibles au CPF, sous réserve qu’ils soient sanctionnés par une certification reconnue.

Maître Marie Martin, spécialiste du droit de la formation professionnelle, observe : « Le cadre juridique de la formation professionnelle s’adapte progressivement aux innovations technologiques. Cette évolution permet de démocratiser l’accès à la formation et de proposer des parcours plus flexibles et personnalisés. »

La sécurisation juridique des parcours professionnels par la formation est un enjeu majeur dans un contexte économique en mutation rapide. Le droit offre un cadre structurant qui permet de concilier les besoins des entreprises et les aspirations des salariés en matière de développement des compétences. Les dispositifs juridiques mis en place visent à responsabiliser les acteurs, à faciliter l’accès à la formation et à promouvoir la mobilité professionnelle. Dans un monde du travail de plus en plus complexe et incertain, la formation s’impose comme un pilier essentiel de la sécurisation des carrières, soutenue par un arsenal juridique en constante évolution.